Parfois, une vie bascule en une image, une odeur, une lumière. Pour moi, ce fut à Marseille, une nuit de doute et de fatigue, face à la mer. J’y ai vu des lumières au large. Ce soir-là, j’ai su qu’un jour, ce serait moi.
Appel du large : une nuit à Marseille, un craquage, et la certitude qu’un jour je serai sur ces bateaux au large.
article mis à jour le 09/08/2025. Temps de lecture estimé : 5 min
1. UNE NUIT À BOUT DE SOUFFLE
J’étais alors étudiante à Marseille, et je traînais encore ce fardeau qui m’accompagnait depuis la fin du lycée : la phobie scolaire. Chaque rendu était une épreuve immense. Rien que l’idée de commencer un travail suffisait à me faire pleurer et me rendre malade. Pourtant, grâce à une personne formidable qui m’a soutenue sans faillir tout au long de cette licence, j’avais réussi à tenir, à ne jamais lâcher.
Je travaillais sur un gros dossier à rendre pour ma Licence, encore une « charrette » interminable. Ce soir-là, c’était trop. Trop de fatigue, trop de pression, trop de peur, trop d’angoisses, trop de ruminations. Je n’arrivais plus à rien. Je me sentais complètement bloquée.
Voyant mon état, mon incroyable partenaire de travail a eu le réflexe le plus simple et le plus précieux : il m’a emmenée dehors à la plage devant laquelle j’habitais, prendre l’air, pour me changer les idées. J’avais besoin d’air. Besoin de silence. Besoin d’autre chose que des écrans et des interminables pages de lignes à rendre.
2. LE SPECTACLE DU LARGE
En sortant prendre l’air ce soir-là, je me suis retrouvée face à la Méditerranée. J’étais vidée, incapable d’aligner une ligne de plus sur mon dossier. Et puis j’ai vu, au loin, des lumières. D’abord une, puis plusieurs. Des bateaux en mer, en route vers ailleurs.
Je suis restée immobile, à les regarder. Et une pensée s’est imposée, sans détour : un jour, ce sera moi. Je ne serai plus sur ce quai, mais à bord, en train d’avancer vers l’horizon.
C’était simple, presque brutal. Je n’avais pas besoin de réfléchir davantage. J’ai compris que ma place n’était pas enfermée derrière un bureau, mais sur l’eau. J’ai à nouveau explosé en sanglots, me demandant quoi faire. Partir tout de suite ou terminer cette étape et garder ça pour la suite ?
3. UN DÉCLIC IRRÉVERSIBLE
Je n’ai pas eu l’impression de « choisir » ce soir-là. C’était plus fort que moi : je n’avais pas d’alternative, je devais un jour aller au large. C’était clair, net, sans discussion possible.
À partir de ce moment-là, même dans les périodes de doute ou d’épuisement, j’avais cette image en tête : ces lumières au loin, et moi, un jour, à la barre d’un bateau pour traverser l’océan.
J’ai pourtant gardé ce rêve pour moi très longtemps. Je n’en ai même pas parlé à mes parents, de peur de leurs réactions, de leurs réflexions sur un projet aussi fou. Mais au fond, je savais que c’était devenu mon cap. Tout ce que j’ai entrepris depuis s’est peu à peu aligné pour me rapprocher de ce moment.
4. CE QUE CETTE NUIT-LÀ M’A APPRIS
Avec le recul, je comprends que cette soirée n’était pas seulement une fuite, mais une vraie révélation.
Elle m’a appris que :
• Les craquages ne sont pas des faiblesses, mais parfois des déclencheurs. Rien n’avance en ligne droite. Aucun apprentissage ni projet ne se fait sur une courbe parfaite. C’est comme une randonnée en montagne : on monte, on atteint un col, on redescend, on reprend une autre montée. Le sommet ne s’atteint jamais à la première ascension.
• Écouter son intuition est vital : cette force intérieure sait souvent avant nous où est notre place.
• Le large est une école : même sans être en mer, ce soir-là m’a montré qu’il fallait parfois avoir le courage de changer de cap.
5. DE LA VISION AU PROJET : TY MANOUK ET LA MINI TRANSAT 2027
Cette soirée à Marseille a été un point de bascule. Elle a posé la première pierre de tout ce que je construis aujourd’hui.
C’est elle qui, de fil en aiguille, m’a menée jusqu’à Ty Manouk, Skol Ty Manouk et la Mini Transat 2027 avec mon Mini 6.50 N°2 hanabi.
Quand je prépare la Mini Transat 2027, je repense souvent à ce moment. Je me dis que c’était déjà le départ, en quelque sorte. Pas encore celui d’une traversée, mais celui d’une décision intérieure : avancer dans ma vie avec la voile comme moteur.
Ce que j’ai vu cette nuit-là, ces lumières au large, je les ai transformées en projet concret. Pour moi, c’est la preuve qu’un rêve, même quand il paraît trop grand ou irréaliste, peut devenir une réalité si on s’y accroche.
L’APPEL DU LARGE
Nous avons tous, dans nos vies, ces instants décisifs. Des instants où l’on touche le fond… pour mieux se révéler. Pour moi, ce fut une nuit à Marseille, au bord de la mer, face à des lumières au large. Et aujourd’hui, chaque mille que je parcours me rapproche un peu plus de ce moment, où je ne regarderai plus les bateaux de loin… mais où je serai enfin à bord.
sur Instagram
Citation inspirante
Il suffit parfois d’une lumière au loin pour rallumer en nous un océan de possibles.